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Gaspard André, architecte lyonnais

Projet pour un monument à Pierre Dupont par Gaspard André - 33ii/226
Archives municipales de Lyon / Palais Saint-Jean

Du 31 mai au 28 juillet 1996

 

 


Conception

  • Jeanne-Marie Dureau

 

 

Du temple protestant des Brotteaux à l'église Saint-Joseph, du théâtre des Célestins à la fontaine des Jacobins, en passant par l'architecture civile et privée et les monuments commémoratifs et funéraires, un grand nombre d'édifices ont été conçus au XIXe siècle par Gaspard André : un architecte éclectique qui s'est offert le luxe d'exercer sa profession comme un art en choisissant ses projets et ses travaux.
Pour la célébration du centenaire de sa mort, les Archives municipales font découvrir ce patrimoine architectural local très diversifié. 

Lyonnais d'origine, né de parents vaudois et de confession protestante, Gaspard André a été l'élève de Bonnefond et de Chenavard. Second grand prix de Rome en 1865 et en 1870, il a su réunir les ferments d'un art à la fois puissant, réfléchi et raffiné, puisé aux sources de l'Italie où il séjourna vers 1867-1868 en complétant son éducation artistique. Fils et neveu d'entrepreneurs en bâtiments, les "frères André" qui construisirent notamment un îlot compris entre les rues Sala, Sainte-Hélène et le quai du Rhône, il se distingua de ces derniers et de la majorité de ses collègues de l'époque par une production où abondent les programmes prestigieux et dont sont exclues les constructions d'immeubles de rapport. Il put ainsi exprimer pleinement ses qualités et illustrer d'une façon très personnelle la période architecturale des débuts de la Troisième République. Encouragé, à l'âge de trente-trois ans, par la commande du théâtre des Célestins par la ville de Lyon, ses projets d'édifices religieux, de monuments publics, de tombeaux, de villas abondent alors dans son portefeuille d'architecte. 

Le succès est au rendez-vous et il réalise, entre autres, la fontaine des Jacobins, le Temple des Brotteaux, l'église Saint-Joseph, le groupe scolaire de la rue Tronchet et plusieurs villas. Si son oeuvre est avant tout locale, elle dépasse aussi largement les frontières de la région, comme en attestent les plans de l'hôtel de ville de Neuilly, du Palais Rumine à Lausanne, entre autres projets et réalisations helvétiques, et les villas qu'il dessine, notamment à Cannes pour ses fidèles clients et amis, les industriels et philanthropes tels que Félix Mangini et Joseph Gillet. Sans compter les projets destinés à la capitale ou à l'étranger, à l'image de ce phare pour le canal de Suez... 
Inscrit de 1856 à 1861 à l'école des Beaux-Arts de Lyon, il acquiert son aisance professionnelle chez l'architecte Louis Bresson puis dans l'atelier parisien de Charles Questel. Prenant résolument parti contre le diktat d'une "architecture nationale" qui se voulait, sous l'influence de Viollet-le-Duc, "gothique", il préconise le roman, plus propice à la composition et plus facile d'emploi dans les techniques modernes de construction. Originaire de Bassins, en pays vaudois, sa notoriété et sa religion amenèrent le consistoire de l'église réformée de Lyon à lui confier, dès 1872, la construction du Temple protestant des Brotteaux dont le chantier s'acheva en 1884. Membre de la Société académique d'architecture dont il deviendra le président, il contribua à ce titre à l'organisation de l'exposition universelle de Lyon en 1894. De toutes ses appartenances dans divers conseils d'administration en matière de formation artistique et professionnelle, celle de membre de l'Académie du Gourguillon, fondée en 1879 par l'architecte et écrivain Clair Tisseur, est de loin la plus pittoresque. Sous le pseudonyme de Joannès Mollasson, Gaspard André y témoigne à la fois de son humour et de son attachement aux traditions locales au sein d'un entourage progressiste et oecuménique.

L'exposition conçue par l'équipe des Archives municipales sous la direction de Jeanne-Marie Dureau, archiviste de la Ville, s'appuie principalement sur le portefeuille de l'architecte, donné par Mme Françoise Bourret, et sur des documents administratifs versés par la ville et d'autres fonds complémentaires conservés dans des collections publiques et privées. Cette profusion de plans, de dessins, d'essais, de relevés, de rendus, de diplômes et de publications permettent de mieux cerner la personnalité artistique de Gaspard André.  

Le plan de l'un de ses deux accessits au Grand Prix de Rome, le "rendu" exécuté en loge d'une école de médecine (1870), est également révélateur de sa formation et de son souci de reconnaissance publique qui le vit continuer à participer à de nombreux concours. En publiant l'inventaire raisonné du fonds constitué du portefeuille de l'architecte et des documents versés par l'administration municipale, les Archives témoignent encore de ses interventions en matière de commande publique et de ses fonctions d'administrateur. Les dossiers du Temple protestant des Brotteaux, de la construction de l'église Saint-Joseph et du théâtre des Célestins constituent à eux seuls les sources maîtresses d'une oeuvre lyonnaise désormais mise au jour. 

Cette exposition et la publication de l'instrument de recherche ont également été rendus possible grâce au concours des Archives départementales du Rhône pour ce qui concerne la villa de La Pérollière, devenue propriété d'un centre de formation d'EDF-GDF, et de la Société académique d'architecture de Lyon. A ces collaborations fructueuses doivent s'ajouter celles de la ville de Lausanne pour le Palais de la fondation Rumine, des écoles nationales des Beaux-Arts de Paris et de Lyon et du musée des beaux-arts d'Angers qui détiennent des projets d'école ou des rendus de l'architecte. Enfin, L'Eglise réformée de Lyon a apporté un précieux soutien en confiant les magnifiques plans et dessins au lavis que Gaspard André a conçus pour le Temple dit des Brotteaux. Avec d'autres oeuvres et projets, il s'agit d'un ensemble rarement réuni de documents retraçant le cursus complet et la carrière magistrale d'un architecte d'entre Rhône et Saône.