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Liberté, égalité, solidarité

Affiche de l'exposition
Archives municipales de Lyon / Grande salle

DU 25 AVRIL 2007 AU 5 JANVIER 2008
 


Commissariat

  • Anne-Catherine Marin, Directrice et Mourad Laangry, chargé des expositions

Conception et réalisation

  • Scénographie : Alice dans les villes
  • Recherches documentaires : Tristan Vuillet, Noëlle Chiron Dorey et Elodie Venet
  • Équipe technique et administrative des Archives de Lyon

 

Articulée autour de ces trois mots qui ont fait l’histoire de notre République, l’exposition conçue par les Archives municipales de Lyon est rythmée par la trame chronologique d’une vie politique nationale et locale à la fois dense et originale…

Avec huit régimes politiques et autant de changements ayant souvent donné lieu à de violentes agitations, le XIXe siècle a connu bien des vicissitudes pour asseoir la République. Principalement parisiens, ces événements sont connus en province par le télégraphe Chappe ou par voie de diligence ; les responsables locaux en informent la population lyonnaise par des affiches placardées au jour le jour sur les murs de la ville, dont les Archives municipales conservent une collection de plusieurs milliers pour cette période et dont une sélection est présentée dans l’exposition. 

Entre Rhône et Saône, les maires affirment peu à peu leur pouvoir face à l’Etat, au cours du siècle comme en témoignent dans l’exposition les portraits et les biographies des seize maires qui se sont succédés, depuis Jean-Claude Fay de Sathonay, maire de la commune de Lyon réunifiée en 1805 par Napoléon, jusqu’à Edouard Herriot, élu en novembre 1905. Pendant vingt-six ans, de 1852 à 1870 et de 1873 à 1881, la ville, surveillée de près par le pouvoir central, a été administrée par le préfet avec une commission municipale, la fonction de maire ayant été supprimée. De 1853 à 1864, c’est la personnalité du préfet bâtisseur, Claude Marius Vaïsse, qui domine la vie politique locale. La restauration complète de l’Hôtel de Ville représente également le symbole du pouvoir municipal.

Ville de la fabrique de la soie disposant d’une organisation particulière du travail dans la première moitié du XIXe siècle, Lyon connaît une profonde mutation industrielle a la fois dans la production et dans l’organisation économique avec le développement du bâtiment, de la mécanique ou de la chimie. Ces caractéristiques font de Lyon un territoire privilégié d’expérimentations sociales, observé avec grand intérêt de toute l’Europe, visitée par Prosper Enfantin, Flora Tristan ou Michel Bakounine. L’exposition développe cette thématique autour de trois axes : le travail , l’entraide et la coopération, l’éducation et la formation professionnelle. 
Au sein des nombreuses réponses apportées à la « question sociale » au cours du siècle, sont mises en valeur des expériences particulières et originales selon les familles idéologiques, qu’il s’agisse d’initiatives privées ou de politiques publiques, d’actions issues de conception de refonte de la société, d’utopies saint-simoniennes et fouriéristes, ou de corrections des inégalités nées des abus du libéralisme économique. Elles témoignent ainsi du pragmatisme des Lyonnais dans les domaines des rapports du travail, de l’entraide, de la coopération, de l’apprentissage de la solidarité républicaine ou encore dans celui de l’éducation et de la formation professionnelle. 

Le foisonnement est riche ; un premier conseil des Prud’hommes est institué à Lyon en 1806 tandis que le mouvement ouvrier naît avec les grèves des canuts de 1831 et 1834, événements qui ont fait écrire à Karl Marx dans le Capital « le prolétariat sonna à Lyon le tocsin de l’alarme ». La première presse ouvrière durable, L’Echo de la Fabrique, voit le jour en 1831 et les premiers syndicats féminins chrétiens sont créés en 1899.

Dès le début du siècle, les sociétés de secours mutuels ont eu un rôle très important d’abord dans la défense du monde du travail puis dans l’assistance, l’assurance et la prévoyance, jusqu’à l’inauguration par le président de la République Raymond Poincaré en 1914 du Palais de la Mutualité, construit par la Ville. Ce n’est pas un hasard si le premier congrès national des sociétés de secours mutuels a lieu à Lyon en septembre 1883. On assiste à la création des premières coopératives de consommation, avec en particulier le « Commerce véridique et social » de Michel Derrion une épicerie coopérative qui fonctionne sur les pentes de la Croix-Rousse de 1835 à 1837. Le deuxième congrès national des coopératives de consommation se déroule quant à lui à Lyon en septembre 1886.

La ville met aussi en œuvre une politique d’enseignement public, laïc et gratuit avant les lois Jules Ferry. Dans l’enseignement professionnel, innovation encore avec l’ouverture en 1826 de l’Ecole de la Martinière, avec celle des filles en 1879, avec la fondation de la SEPR (Société d’enseignement professionnel du Rhône) en 1864 ou encore la création de l’Ecole municipale de Tissage en 1884. Enfin, des actions de formations des travailleurs initiées par les tenants du catholicisme social ont lieu à Lyon dès 1836.

L’exposition est aussi l’occasion de mettre en lumière quelques figures féminines lyonnaises qui ont marqué leur époque par leur engagement militant ou leur action caritative. Comme la militante féministe Eugénie Niboyet (1799-1883), fondatrice en 1833 du journal « le Conseiller des femmes » ; Pauline Jaricot (1799-1862) certes fondatrice de l’œuvre de la Propagation de la Foi , mais aussi soucieuse d’aider les ouvriers, œuvre dans laquelle elle engloutit sa fortune ; Philomène Rozan, meneuse de la première grande grève féminine en 1869 dite des « ovalistes » ; Marie-Louise Rochebillard (1860-1936), fondatrice du syndicalisme féminin chrétien ou encore Rose-Pauline Aynard (1845-1910), dame d’œuvres, épouse du banquier Edouard Aynard.

Témoins de l’histoire ou traces de la vie quotidienne des Lyonnais, de nombreux documents, tableaux, bustes, manuscrits, brochures, prospectus, dessins, photographies et affiches habituellement conservés dans les cartons des réserves sont également offerts aux visiteurs. Tels ces avis au public du retour de Napoléon en mars 1815, ces proclamations de l’instauration de la Monarchie de Juillet, ces dépêches télégraphiques de l’abdication du roi et des émeutes de 1848, ces décrets du rétablissement de l’Empire héréditaire, les proclamations de lois d’organisation sous la IIIe République, l’annonce de l’assassinat du président Carnot (1894) et l’ordre de mobilisation générale du 2 août 1914. 

Ces jalons de l’histoire du XIXe siècle côtoient des pièces passionnantes, comme ce projet de costume du peintre Pierre Henri REVOIL (1776-1842 pour les pages de Madame Royale, duchesse d’Angoulême qui effectue un séjour à Lyon en août 1814 ou ce plan figuré de la 1ère organisation du mutuellisme, organisations tirant leurs origines des confréries, des corporations et du compagnonnage. Signé Pierre Charnier, directeur provisoire en 1827, ce dessin est l’une des deux seules représentations symboliques connues. Habituellement conservé à l’Hôtel de ville, une huile sur toile signée Marguerite Cornillac, peintre des panneaux décoratifs de la salle du conseil municipal, représente la proclamation du suffrage universel en 1848 sur les marches de l’Hôtel de Ville. Le visiteur trouvera également une carte d’adhésion à l’Association Internationale des travailleurs (A.I.T.) signée par le Russe Michel Bakounine, venu à Lyon lors du bras de fer mené par les internationalistes en septembre 1870 et une lettre manuscrite de Léon Gambetta en date du 12 août 1871. Celui qui joua un rôle essentiel pour la destitution de l’Empereur et qui constitua avec l’avocat lyonnais Jules Favre un gouvernement provisoire le 4 septembre 1870 à l’annonce de la défaite de Sedan, y souligne la volonté de la politique de la ville en matière d’éducation, ce, deux ans avant les lois Jules Ferry.

Présentés pour la première fois, on pourra découvrir les tableaux des médailles, décorations et autres symboles des métiers et des sociétés de secours mutuels, jadis accrochés dans l’arrière salle des bistrots lyonnais où se tenaient les réunions. A la disposition du visiteur, un espace multimédia permettra grâce à une base de données de prendre connaissance de centaines d’événements de toute nature qui se  sont déroulés à Lyon au cours du XIXe siècle et d’accéder au site de L’Echo de la Fabrique, premier organe de la presse ouvrière créé en 1831. 
Enfin, pour mieux s’immerger dans ce siècle foisonnant, le Centre des musiques traditionnelles Rhône-Alpes (CMTRA) a réalisé pour la circonstance une ambiance sonore inédite composée de chants, discours politiques, chansons du milieu ouvrier, de valses ou bruits de métiers à tisser issus d’enregistrements d’époque, d’interprétations et de créations plus récentes.