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Remonte dans ton arbre

Affiche de l'exposition
Archives municipales de Lyon / Grande salle

DU 18 JUIN 2003 AU 3 JANVIER 2004
 


Commissariat

  • Samantha Cabello avec la collaboration de l'ensemble NOAO

Conception et réalisation

  • Scénographie : Ensemble NOAO
  • Graphisme : Plan fixe
  • Équipe technique et administrative des Archives de Lyon

En nous regardant le nombril, nous nous posons souvent les mêmes et éternelles questions : qui sommes-nous, d’où venons-nous ? Nous aurions aussi aimé en savoir plus sur l’arrière-grand-père Octave, sur les raisons ayant poussé le grand-oncle François à émigrer « aux Amériques » ? Et puis, pourquoi la tante Emilie, n’a-t-elle eu qu’un seul enfant ?

Sous les patronymes, derrière les branches de l’arbre aux aïeux se cachent souvent des petits conflits, des non-dits, des secrets de famille. A la soif métaphysique de savoir si nous sommes issus de la cuisse de Jupiter, si nous descendons de princes ou de lingères, s’insinue la certitude d’être tous cousins et de faire, en somme, un peu partie de l’Histoire. Le hasard des exodes, des naissances illégitimes, des remariages et des éclatements professionnels ou familiaux soude, au-delà des différences d’ordre génétique, les maillons de l’immense chaîne de l’humanité…

C’est un constat : parallèlement à la mobilité et à l’éclatement des familles, les recherches généalogiques font de plus en plus d’adeptes. Si la généalogie -du grec science ou connaissance des origines- attire à ce point nos contemporains en ces périodes de mutations et de « mondialisation » de la société, c’est parce qu’elle recèle autant la volonté identitaire que le désir -rassurant- d’appartenir à une société. Les dépôts d’archives se situent ainsi au centre de cette quête, comme de véritables gisements d’histoires qui permettent à chacun de se reconnaître au sein de sa propre famille, de sa société, de son vécu et de sa culture.
Dépositaires de l’état civil des Lyonnais depuis 1532 et de la mémoire de la Ville, les Archives municipales de Lyon ont choisi de leur côté, avec la collaboration de l’Ensemble NOAO, de rendre la recherche généalogique moins labyrinthique qu’elle ne paraît. Avec la volonté, quelque part, de dépasser l’image d’Epinal véhiculée par la vénale procédure de succession ou la constitution d’une galerie d’ancêtres pour l’album de famille.

L’exposition que les Archives municipales proposent dans leurs locaux du quartier de Perrache permettra d’amener le visiteur à une réflexion sur lui-même, sur ses origines et son appartenance. Et ce, grâce à plusieurs dizaines de documents d’archives issus de ses fonds et de pièces uniques prêtées par des musées ou institutions. Installé dans ses multiples aspects au centre de l’exposition, le document d’archives, moteur essentiel de la recherche généalogique, est le point de convergence des espaces thématiques complémentaires touchant à la famille, aux origines, aux religions, aux sciences et aux cultures.

Libre de choisir son propre itinéraire, le visiteur est ainsi plongé dans le vif du sujet dès le hall d’entrée, tapissé d’images de rayonnages d’archives sur fond de papier kraft. Tel un voyage initiatique, il pénètre tout d’abord dans un sas-miroir évoquant le « moi », le nombril-univers, une façon de se sentir en quête de soi. Le parcours le conduit ensuite vers différents pôles ; comme celui de la famille, avec son grenier reconstitué, ses photos et ses papiers jaunis, premiers indices formels pour se lancer dans l’enquête… Laquelle passe parfois par les secrets de famille et leur cortège de surprises ou de « trous noirs » : les enfants abandonnés ou adoptés, les disparitions, l’emprisonnement.
Autant d’impasses renvoyant alors à l’espace central, réservé au document d’archives issu de l’administration, témoin de la réglementation par la société de nos faits quotidiens et creuset officiel constitué de registres d’état civil, de recensements, de listes électorales et de livres fiscaux ayant fixé et figé nos vies. Dans le pôle consacré à l’histoire, les lignées ont laissé des traces de leur appartenance à des événements politiques ou socio-économiques. Ce sont là des correspondances de guerre, des armoriaux ; ici des listes de guillotinés ou des passeports de migration. Mais au-delà de ces traces ou de ces souvenirs, il y a enfin la transmission des gestes entourant la naissance, le mariage et la mort. Ritualisés, devenus traditionnels, ils font partie de la culture des ancêtres, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs. D’abord en clans ou en communautés, l’homme a finalement constitué des civilisations qui ont secrété chacune des explications sur les origines : la cosmogonie en est la résultante, riche de diverses croyances, composées de couples originels différents selon les cultures et dont nous serions tous les descendants. Enfin, la science intervient dans cette quête de manière plus large et universelle en portant un regard sur la notion darwinienne des espèces ou sur la transmission du patrimoine génétique, faisant de nous des êtres à la fois semblables et uniques.

Ces espaces encerclent un pilier central érigé de boîtes d’archives et de fiches issues du fonds Jean Tricou, l’infatigable notaire lyonnais qui a passé sa vie à la recherche généalogique et héraldique, une sorte de totem fédérateur symbolisant le travail et la matière première accumulée par le chasseur d’ancêtres érudit et passionné.
Illustrée également par un fond sonore concocté par le Centre des musiques traditionnelles Rhône-Alpes, Remonte dans ton arbre aborde la généalogie dans toutes ses dimensions et tous ses contrastes. De façon originale, en permettant au visiteur, au chercheur amateur ou au spécialiste de s’imprégner du sujet selon son humeur, en lui donnant ainsi l’impression, à défaut d’ouvrir la boîte de Pandore, de pénétrer un peu au coeur… d’une boîte d’archives.