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La révolte des Canuts
La révolte de l’automne 1831 s’inscrit dans un processus commencé en 1744, avec l’édit qui accorde aux négociants le monopole des ventes. Les canuts, mécontents de leur condition, réclament sans succès une hausse du tarif. Le 25 octobre 1831, la médiation du maire et du préfet leur permet d’obtenir un accord, qui n’est jamais appliqué. L’association mutuelle des chefs d’atelier de soierie décide alors une grève générale le 20 novembre. La révolte est sanglante et les autorités sont submergées : environ 600 morts et blessés. Les canuts, sans mot d’ordre politique, retournent à leurs ateliers sans avoir rien obtenu. Le duc d’Orléans et le maréchal Soult, à la tête d’une importante armée, reprennent la ville. L’administration du département du Rhône est confiée à Adrien de Gasparin, préfet de l’Isère. Bien que le préfet ait pris des mesures sociales en faveur des canuts, les problèmes sociaux de la Fabrique demeurent latents.
En 1833, le patronat envisage de baisser les salaires des ouvriers. En février 1834, les canuts déclenchent une nouvelle grève générale. 6 000 ouvriers de la Croix-Rousse, de la rive droite de la Saône et du centre sud de la Presqu’île se soulèvent. L’armée, obéissant aux consignes du ministre de l’intérieur Adolphe Thiers, semble abandonner une partie de la ville aux insurgés, avant de passer à l’offensive, du 11 au 15 avril 1834 : la répression est sanglante, plusieurs centaines de victimes et 10 000 arrestations.
Au début du second Empire, Lyon est encore marquée par les insurrections des canuts. Son centre-ville est très dense, avec des rues étroites et tortueuses et des conditions d’hygiène déplorables. L’arrivée de Vaïsse, le 25 mars 1853, avec la double responsibilité du département et de la municipalité, relance le projet du percement d’une rue centrale, la rue Impériale pour apporter « le mouvement, l’air, la lumière et la santé », « chasser l’émeute de ces retranchements en substituant à des rues étroites et tortueuses des rues larges et droites, en tout temps accessible à la force armée ».
Insurrections de Lyon, 1834 ; Affiche lithographiée pour un ouvrage ; Imprimé en in-octavo par L. Perrin Archives municipales de Lyon, 16FI/468
Insurrections de Lyon, 1834 ; Affiche lithographiée pour un ouvrage ; Imprimé en in-octavo par L. Perrin
Archives municipales de Lyon, 16FI/468

 

Mairie de la ville de Lyon. Avis du maire. Les individus qui se présenteraient encore pour interdire les métiers, seront arrêtés immédiatement et livrés aux tribunaux ; Affiches administratives, 19/02/1834 Les grèves de février 1834 sont les prémices de la 2è révolte des canuts Archives municipales de Lyon, 6FI/6492
Mairie de la ville de Lyon. Avis du maire. Les individus qui se présenteraient encore pour interdire les métiers, seront arrêtés immédiatement et livrés aux tribunaux ; Affiches administratives, 19/02/1834
Archives municipales de Lyon, 6FI/6492

 

La maison Brunet
Les locataires de la maison Brunet en actions de grâce, Ex-voto suite bombardement de la maison Brunet à la Croix-Rousse ; Huile sur toile ; Lyon, 1834
Fondation Fourvière - Musée d’art religieux, P101

 

Deuxième Insurrection de Lyon
Deuxième Insurrection de Lyon, le 10 avril 1834 ; Gravure de Philippe-Auguste Jeanron ; Planche extraite d’une édition du livre ”Révolution française. Histoire de dix ans. 1830-1840” de Louis Blanc, publié par Pagnerre, Paris : Imp. F. Chardon ainé, [1850]
Bibliothèque municipale de Lyon, fonds Chomarat

 

Situation du pavillon de péage
Situation du pavillon de péage du pont Lafayette, du côté de la ville ; Gravure sur bois publiée dans un numéro du journal Charivari de mai 1834
Archives municipales de Lyon, 16FI/152

 

Plan indiquant les positions
Positions occupées par la garnison et les insurgés

 

Le contrôle de la ville avait été abandonné par les forces de l’ordre lors de l’insurrection de 1831. Trois ans plus tard, lors de la nouvelle insurrection des tisseurs de la soierie – les canuts – en 1834, l’armée s’était préparée, et la carte montre bien, en bleu, les points d’appui des forces de l’ordre. Le rouge montre ceux des insurgés, et les lavis bleu et rose les secteurs respectivement contrôlés au plus fort des événements.
Le ministre de l'Intérieur Thiers demanda au préfet de rendre compte avec précision de la situation, d’où cette carte réalisée par l’armée, qui resta confidentielle et ne fut redécouverte que vers 2010.
Les étendues contrôlées par les insurgées correspondent très bien avec celles où les ateliers de tissage se trouvaient (et qui étaient plus nombreux côté Fourvière que sur les pentes de la Croix-Rousse, contrairement à une légende bien établie), qu’on peut cartographier à partir des recensements contemporains.

Plan d’une partie de la ville de Lyon indiquant les positions occupées par la garnison et les insurgés pendant les journées du 9 au 14 avril 1834
Bibliothèque nationale de France, GE C-3005
Projet d’amélioration de la ville de Lyon, Lettre du sénateur Vaïsse au ministre de l’intérieur ; Manuscrit, novembre 1853  Archives municipales de Lyon, 321WP/173

Plusieurs raisons concourent à motiver l’intervention de l’Etat dans une affaire qui ne saurait être considérée comme une simple affaire communale. D’abord, la raison de sûreté générale. C’est dans le quartier des Cordeliers qu’on s’est battu en 1831 et 1834. Une carte dressée à l’Etat-major général de la division et que je joints à mon exposé montre qu’à cette dernière époque, les insurgés occupaient précisément tout l’espace que doit traverser la rue Impériale. C’est là encore qu’en décembre 1851, devait commencer l’attaque si la promptitude des mesures prises par l’autorité militaire ne l’avait prévenue. Ces circonstances font de la rue Impériale une rue véritablement stratégique et de l’ouverture de cette rue, une opération qui doit contribuer puissamment à la sûreté de la ville de Lyon.

Projet d’amélioration de la ville de Lyon, Lettre du sénateur Vaïsse au ministre de l’intérieur ; Manuscrit, novembre 1853
Archives municipales de Lyon, 321WP/173
Extrait du plan de la ville de Lyon

On a longtemps pensé que ce plan représentait tout l’espace tenu par les canuts lors de l’insurrection de 1834, mais la découverte du plan d'ensemble dans les archives parisiennes a montré qu’il ne s’agissait que d’un extrait, destiné à argumenter le projet de percement de la rue de la République par le maire-préfet Vaïsse. Le choix de la partie de l’insurrection représentée est donc volontaire. Le plan ajoutait une information nouvelle, le détail des traboules utilisées lors de l’insurrection.

Extrait du plan de la ville de Lyon où sont représentés les positions occupées par la garnison et les insurgés pendant les journées du 9 au 14 avril 1834
Plan manuscrit sur calque, novembre 1853
Archives municipales de Lyon, 3S/732
Plan des améliorations réalisées ou projetées dans le centre de la ville de Lyon ; Lithographie, dressé en 1863 par l’ingénieur en chef du service municipal ; échelle 1/2 000 Archives municipales de Lyon, 2S/24

Récemment placé à la tête de l'administration municipale, Vaïsse fit travailler très activement le personnel de la ville pour produire un plan d’urbanisme d’ensemble, le premier de cette ampleur pour Lyon, soumis à l’empereur Napoléon III qui donna rapidement son approbation. Ce projet visait aussi à régler le risque de nouvelles insurrections, et donc prévoyait la transformation profonde de la presqu’île avec la percée de la rue de la République.
Ce plan montre l’étendue des travaux réalisés entre 1853 et 1863 dans l’espace documenté par le plan des insurrections. La réussite du projet de Vaïsse de transformation de Lyon fut éclatante et en fit un exemple à suivre pour de nombreuses autres grandes villes en France.

Plan des améliorations réalisées ou projetées dans le centre de la ville de Lyon ; Lithographie, dressé en 1863 par l’ingénieur en chef du service municipal ; échelle 1/2 000
Archives municipales de Lyon, 2S/24