Une ambition

Depuis sa création au début du XVIII^e siècle, l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, a mis en avant son utilité publique. C’est le cas lors de l’élection d’un de ses membres, Fleuri-Zacharie-Simon Palerne de Savy, comme premier maire de la ville. Son investiture est l’occasion pour un autre académicien, l’abbé Rozier, de rappeler, devant la municipalité entière, dans la salle dite d’Henri IV à l’Hôtel de ville, « que les veilles et les travaux de la Compagnie seront sans cesse employés à seconder les vues d’une municipalité protectrice du commerce, des sciences et des arts ».
Observons toutefois que si l’utilité de l’Académie s’est imposée dans la gestion de la cité, c’est que les structures administratives municipales sont alors très légères. Le consulat, heureux d’avoir à sa disposition à bon compte des experts, encourage les engagements désintéressés des académiciens. En contrepartie, il octroie à la compagnie la salle des portraits de l’hôtel de ville, « afin qu’elle y tienne ses assemblées particulières et publiques ». En outre, il prend à sa charge « les frais de l’écritoire, du feu et de la lumière », et lui accorde tous les deux ans une bourse de 600 jetons d’argent répartis entre les académiciens en proportion de leur assiduité et de leur travail.

Une délibération consulaire du 30 juin 1763 établit le rôle de l’Académie comme institution quasi officielle, en lui attribuant la charge de « fournir toutes les inscriptions dont la ville a besoin pour ses monuments » et d’examiner les inventions présentées par le Consulat et par les concours qu’elle propose.

Institution reconnue, l’Académie incarne aussi le prestige de la cité. Elle est régulièrement invitée par la municipalité pour faire partie des délégations lors des visites royales et princières, comme celles de la duchesse d’Artois en 1773 ou du prince Henri de Prusse, en 1784. Certains de ces visiteurs ne manqueront pas d’assister à une séance solennelle de l’Académie.

Les domaines d’intervention des académiciens sont variés. Ils s’étendent de l’évaluation de nouveaux procédés techniques ou inventions d’utilité publique, à des missions aussi importantes que la santé y compris militaire, les orientations stratégiques pour, entre autres, la défense de la cité, l’hygiène, l’urbanisme, l’architecture, l’éducation, le travail, ou la sécurité alimentaire. Ce rôle d’expertise s’exerce au-delà des frontières municipales. La compagnie est consultée par le Directoire du département et par le tribunal de district.

À partir de 1835 environ, avec la fondation des facultés des sciences et des lettres et le développement d’autres sociétés savantes, le rôle des académies évolue. Celles-ci prennent plus de recul par rapport à la vie de la cité, et se consacrent aux prix divers (concours sur questions ou sur dossiers, prix de bienfaisance). En outre, les administrations, mieux structurées, sollicitent les expertises des bureaux d’études, des agences d’architecture spécialisées.
En conséquence, la fonction de conseil de l’Académie s’efface petit à petit, pour faire place à des actions de rayonnement intellectuel, de diffusion des sciences et techniques, d’encouragement à l’archéologie, aux initiatives d’amateurs et aux réflexions de savants et d’hommes et femmes de lettres confirmés.

L’histoire de l’Académie se confond avec l’histoire politique de la ville Lyon. Dès 1726, la compagnie désigne les prévôts des marchands membres associés et à partir de 1847, les maires sont des présidents honoraires. Des maires et préfets sont également élus à l’Académie du fait de leur expertise scientifique ou littéraire.